Le jour où je suis monté dans une WRC (partie 1)

Du fond de mon lit, j’ouvre un œil, le réveil affiche 4h17, dans quelques minutes il va sonner, cette fois je n’attends pas, un bond et me voilà hors du lit, d’attaque. C’est fou comme il y a des jours où l’on peut se lever bien plus facilement que d’autres ! Deux jours avant, j’apprenais que j’allai pouvoir monter dans une WRC et depuis je n’ai qu’une hâte c’est d’être à ce jour là. Après quelques heures de route, avec Chris (Extrem Rallye), on approche de la base d’essais que va utiliser M-Sport pendant 3 jours. On commence à en connaitre quelques unes, mais pas celle-ci non loin de Valence. Il n’est pas encore 8h30, l’assistance étant à l’autre bout de la spéciale, on va parcourir le tracé. Sur les 5km d’asphalte, on s’imagine les passages, d’un virage à l’autre, d’une courbe à un enchainement, on monte, on monte jusqu’à une fin de base qui nous semble spectaculaire et rapide.

On arrive à l’assistance, l’équipe M-Sport est là en train de préparer les derniers détails sur l’auto. La Fiesta est aux nouvelles couleurs de l’équipe, on la trouve plutôt sympa. Ce nouveau bleu à l’avant colore la livrée et apporte du changement sans bouleversement. On salut le team toujours aussi chaleureux, l’équipage Eric Camilli / Nicolas Klinger est en train de prendre place à bord, la séance ne va pas tarder à commencer. On se positionne au tout début de la base, la Fiesta se lance, chauffe, serpente pour descendre dans la vallée. On l’aperçoit au loin faire demi-tour, on dirait bien que c’est parti pour de bon après ce petit tour afin de tout mettre en température. La Ford remonte, elle approche. La dernière partie est, en effet, très rapide. La Fiesta arrive à fond de 6 dans une enchainement très rapide pour un gros freinage sur un droite final. Oohh ! On va monter là dedans ?! De l’extérieur, c’est déjà bien impressionnant ! La pression commence à monter d’emblée ! On ne sait pas exactement quand on montera à bord de la Fiesta mais ce n’est pas tout de suite, alors on descend découvrir cette spéciale pour profiter des passages d’Eric Camilli toute la matinée. Il est souvent à l’attaque, on prend plaisir sur le bord de la route comme à chaque fois qu’on se rend sur une séance d’essais mais la petite idée qu’on va le vivre de l’intérieur plus tard change un peu la donne. Juste après le kif de voir un beau passage vient l’impatience de vivre ça de l’intérieur.

A l’heure du repas, je demande à notre chef préféré ce qu’il me conseille de manger avant mon tour dans l’auto. Il me rassure en me disant que sur la terre il aurait pu me conseiller mais que sur l’asphalte, j’allais rien garder de toute manière ! Allez, on va assurer, ça sera pasta et basta ! Il y a du choix au buffet, mais on va éviter d’essayer des trucs aujourd’hui ! Après quelques runs en début d’après-midi, on me tend une feuille : Ah, ah, c’est la fameuse décharge que j’attends de signer depuis des années ! J’ai le temps, je lis, mais j’avoue que je ne me rappelle pas un mot de ce truc, j’étais déjà ailleurs ! J’appelle Chris pour qu’il fasse de même. Il est clairement moins tendu que moi : il a déjà une expérience à bord de la Focus WRC avec Jari-Matti Latvala. On nous fait essayer le casque, on sent que ça approche. On nous indique que ce n’est pas tout de suite mais que ce sera avant la tombée de la nuit, on fera nos runs de jour, c’est cool, on préfère pour en profiter à fond. Qui va passer en premier ? Avec Chris, ça se décide vite, c’est le bizut en premier ! L’auto revient à l’assistance et finalement, c’est maintenant, tout de suite ! Oulà ! J’ai du mal à attacher mon casque, l’émotion commence à monter, je suis tout tremblant. Je demande à l’ingé : « mais, c’est maintenant ? Tout de suite ? », il me répond calmement : « Oui, maintenant. ». Je me dirige vers la Fiesta, Eric n’a pas bougé, il est au volant; de mon côté, je me glisse au dessus de l’arceau pour prendre place. Je laisse faire le mécano qui me sangle au fond du baquet. Il me demande de tourner la tête pour connecter l’intercom, il retire sur les sangles, il me demande si tout est ok, il retire sur les sangles, et avant de fermer la portière, il retire sur les sangles ! Ok, je crois qu’au niveau du harnais, c’est bon ! L’auto est prête mais Eric échange avec le team. D’abord avec l’ingénieur qui s’occupe de la séance qui lui indique qu’il doit faire deux essais avec des paramètres différents. Eric m’apprend alors que je vais avoir droit à un deuxième tour gratuit ! Cool ! Il ajoute immédiatement qu’il apprécie également car il a besoin de roulage. Il demande ensuite à son copilote quelques indications sur des manips que fait habituellement Nicolas sur la console. C’est enfin, le technicien Michelin qui vient lui rappeler qu’il s’agit d’un montage croisé entre pneus tendres et supers tendres. Je comprend que c’est la première fois qu’il va essayer ce panachage, Eric lit certainement une petite crainte dans mon propos : « ne t’inquiète pas, ils sont neufs, on sent pas la différence, c’est quand ils commencent à s’user que ça peut jouer ». Ca fait maintenant quelques minutes que l’on est prêts dans l’auto mais toujours immobilisés à l’assistance, on continue de discuter via l’intercom même s’il est difficile de se regarder en étant harnachés au fond de nos baquets avec les protections latérales. Un mécano fait signe, Eric met le contact, la marche arrière est enclenchée alors que quelques gouttes de pluie commencent à apparaitre sur le pare-brise. La Fiesta sort de l’assistance pour aller s’immobiliser quelques mètres plus loin au début de la spéciale d’essais. Mon cœur commence à battre un peu plus fort alors que l’on attend le feu vert pour partir, je ne suis pas tendu, juste impatient de ressentir tout ça. Un pouce levé devant nous et c’est parti.

La suite dans la deuxième partie.


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